Rénovation énergétique : Élie, Marc et Évelyne témoignent
Dans la Nièvre, la précarité énergétique frappe plus durement qu’ailleurs. On estime qu’un habitant sur quatre est concerné (14% de la population au niveau national), principalement en raison d’un parc de logements ancien (60% des logements ont été construits avant 1975). Face à ce fléau aux conséquences sanitaires et sociales, le Secours Catholique expérimente l’accompagnement de propriétaires modestes dans la rénovation de leur habitation énergivore. Nous avons rencontré trois ménages concernés pour comprendre les difficultés rencontrées, et l’importance pour eux de pouvoir bénéficier d’aides à la rénovation et d’un accompagnement humain.
Élie « se bat pour ses enfants »
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Dans la maison d’Élie, il n’a pas toujours fait aussi bon. «
J’ai reçu une facture de régularisation d’environ 1400 euros, c’était trop.
Acculé, Élie se tourne vers les services sociaux, qui l’orientent à leur tour vers le Secours Catholique de Décize, la ville voisine. Auprès de l’association, le père de famille bénéficie d’un premier coup de pouce : des bons alimentaires, «
Depuis 2022, le Secours Catholique de la Nièvre expérimente l’accompagnement de propriétaires modestes afin qu’ils puissent accéder aux aides à la rénovation énergétique de leur logement et aller au bout du chantier. La situation d’Élie est identifiée comme entrant dans ce cadre. «
Prêt remboursable
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En cette mi-octobre, Élie s’apprête à passer son premier hiver avec un poêle performant et une meilleure isolation. Il va pouvoir accueillir ses enfants sur ses jours de repos, comme ce mercredi, sans craindre qu’ils prennent froid. Dans le jardin agrémenté d’un potager qui fait son bonheur, le père de famille a installé trampoline, toboggan, piscine à boudin, et a construit plusieurs cabanes. Même si toutes ses difficultés ne sont pas encore derrière lui, il a plus souvent le sourire. «
Marc « ne savait pas qu’il pouvait avoir autant d’aides »
Le soleil brille quand nous arrivons chez Marc, à Garchizy, dans l'agglomération de Nevers. L’homme avenant de 63 ans, artisan à la retraite, nous montre la façade de son pavillon : l’isolation par l’extérieur a été réalisée la semaine précédente. «
J’ai mis du scotch autour des fenêtres pour que l’air passe un peu moins.
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Marc reçoit les clés de la maison au mois d’août. Il la vide, et aère jour et nuit pour l’assécher, profitant de la canicule. «
« Pas trop paperasse »
Bénévole au Secours Catholique, Marc est bien placé pour être repéré par l’association comme pouvant bénéficier d’un accompagnement à la rénovation. «
Désormais libéré des contraintes d’entretien de son ancien terrain, et revenu dans le quartier où il est né, Marc «
Évelyne « n’a pas d’autre choix que d’être patiente »
Nous rencontrons Évelyne à Nevers, dans sa maison de centre-ville. Un bâti des années 30 sur deux niveaux, avec un jardin à l’arrière, une cheminée dans le séjour, des livres et des objets que l’on devine choisis avec soin, une cuisine pleine de bocaux et de plantes aromatiques. «
RESTE À CHARGE TROP ÉLEVÉ
Évelyne n’a alors plus les moyens de faire remplir sa chaudière à fioul. Elle allume un radiateur d’appoint dans sa chambre dix minutes avant de se coucher, fait occasionnellement un feu dans la cheminée du salon. «
Elle entreprend alors de premières démarches pour monter un dossier de demandes d’aides à la rénovation énergétique. Les devis qu’elle fait établir, comparés aux aides publiques potentielles, font apparaître un reste à charge beaucoup trop important. Évelyne en reste là. Mais au sortir du Covid, et après un nouvel hiver «
La grosse difficulté, c’est la relation aux artisans. Ils sont tous débordés.
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Pour Évelyne, le chantier s'élèverait à près de 80 000 euros pour le volet énergétique, et à environ 28 000 euros pour celui de l'adaptation du logement à sa situation d’invalidité, afin qu’elle puisse se maintenir le plus longtemps possible chez elle. «
Quand on est seule, à un moment, on baisse les bras.
Autre obstacle : le temps que prend l’aboutissement d’un dossier. Au moment de solliciter les subventions, les devis établis par les artisans doivent dater de moins de trois mois. Au fur et à mesure des changements réglementaires, et des mois qui passent, il faut donc les faire réactualiser. «
Alors qu’elle a engagé les premières démarches il y a quatre ans, Évelyne ne perd pas espoir de pouvoir un jour faire faire les travaux. « Je n’ai pas d’autre choix que d’être patiente, malgré les baisses de moral, reprend-elle. Ce qui me motive, c’est la perspective de pouvoir vieillir dans cette maison. Je dois me projeter avec des solutions d’autonomie, car je n’ai pas envie d’aller dans un foyer pour personnes âgées. J’entends bien que ce serait une solution plus facile que de rester dans cette maison, mais je ne me vois pas la vivre ».
Évelyne nous accompagne dans son jardin, encore luxuriant sous le soleil d’automne. « Ça peut paraître idiot, mais ce bout de jardin m’a reconstruite après mon accident, et c’est aussi une part de mon alimentation et de ma santé. Avec mes livres, qui sont la mémoire de mon métier passé, c’est ce qui me soutient. Heureusement que j’ai cela. »